Dans un arrêt rendu le 10 février 2015, la Cour de cassation confirme que l’employeur a tout à fait le droit de consulter les SMS envoyés et reçus par ses employés sur leur téléphone professionnel, sans les en avertir.
afp.com/Justin Sullivan
Vent de panique chez les salariés détenteurs d’un téléphone professionnel: d’après un arrêt rendu par la Cour de cassation le 10 février 2015, repéré par Metronews, l’employeur a tout à fait le droit de consulter les SMS envoyés et reçus par ses employés, sans les en avertir. Inquiétant? La décision n’introduit en tout cas aucune nouveauté en droit.
La haute juridiction était amenée à se prononcer sur un litige entre deux sociétés de courtage. La première reprochait à son concurrent d’avoir débauché plusieurs de ses salariés en fournissant pour preuve les textos échangés par ses ex-employés. Un procédé jugé « déloyal » par la société adverse, car réalisé « à l’insu tant de leur émetteur que de leur destinataire ».
La Cour de cassation a pourtant donné raison au patron « fouineur », reprenant l’argumentaire de la cour d’appel de Paris: « Les messages écrits envoyés ou reçus par le salarié au moyen du téléphone mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel. » Le patron est donc autorisé à les consulter en dehors de la présence de l’intéressé, à moins qu’ils ne soient explicitement identifiés comme « personnels ».
« La justice considère depuis longtemps que tous les outils mis à disposition du salarié sont présumés professionnels », explique l’avocat Christophe Noël. L’arrêt ne fait donc « que confirmer la jurisprudence actuelle », confirme Yves Nicol, avocat spécialisé en droit social. « L’ordinateur et le téléphone professionnels, au même titre que le pot à crayons, appartiennent à l’entreprise, qui peut en disposer comme elle le souhaite pour connaître leur contenu, sans avoir à fournir d’explication », poursuit-il. Rien à voir avec unesurveillance à l’insu du salarié, « puisqu’il s’agit d’un outil de travail. Nous ne sommes pas dans le domaine de la sphère de la vie privée. »
La jurisprudence ne prévoit qu’une limite à ce droit de « fouiller »: l’employeur ne peut le faire qu’en présence du salarié ou après l’avoir averti, si les informations – messages, documents, etc. – sont clairement présentées comme « personnelles » dans leur objet. La Cour de cassation le confirme dans son dernier arrêt.
Seule bizarrerie dans ce cas précis: « Comment étiqueter comme ‘personnel’ un SMS qui ne comporte jamais d’objet? relève Yves Nicol. La décision est logique en droit, mais elle ne tient pas compte de la réalité technologique. » Sauf à en faire mention dès les premiers mots, la solution la plus sûre consiste donc à garder deux téléphones, l’un pour le boulot, l’autre pour le « perso ».
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